Six histoires étranges, à la frontière entre le fantastique et la science fiction, où Serge Lehman convie le lecteur à explorer des réalités sous-jacentes, parfois angoissantes, parfois révélatrices, mais toujours intriguantes.
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Serge Lehman[1], né le à Viry-Châtillon dans l'Essonne, est un écrivain, scénariste et critique français. Se définissant lui-même comme « polygraphe »[2], il est depuis le milieu des années 1990 l’une des figures du fantastique et de la science-fiction en France.
Il a publié sous les pseudonymes de Corteval, Don Hérial et Karel Dekk.
Né dans une famille d’enseignants, Lehman découvre la science-fiction à l’âge de dix ans, expérience qui constitue selon lui une révélation et une compensation symbolique au divorce de ses parents[3]. Adolescent « humanoïde »[4], fasciné par les revues Strange et Métal Hurlant et par des auteurs comme Philip K. Dick ou Michel Jeury, il est encore élève au Lycée J.-B. Corot de Savigny-sur-Orge lorsqu’il commence à publier, dans les fanzines, des nouvelles et des histoires courtes en bande dessinée ; il crée aussi l’une des premières émissions consacrées aux “mauvais genres” sur la bande FM qui vient de s’ouvrir[5]. Après une année d’Hypokhâgne, il interrompt ses études pour travailler comme libraire [6] mais c’est la reprise d’un cursus d’histoire des sciences à la Sorbonne en 1987 qui lui fournit la matière de ses premières publications professionnelles, dans la presse et aux éditions Fleuve Noir.
Déterminé à vivre de sa plume, Lehman délaisse provisoirement la bande dessinée et publie au cours des dix années suivantes dix romans, quatre-vingt nouvelles et une centaine d’articles et d’essais dont certains contribuent à refaçonner le paysage de la SF française. La trilogie cyberpunk F.A.U.S.T., le space-opéra Aucune étoile aussi lointaine et l’anthologie Escales sur l’horizon, tous parus entre 1996 et 1998, manifestent ce désir de relancer le genre que Lehman partage avec d’autres écrivains apparus à la même époque, Ayerdhal, Pierre Bordage, Laurent Genefort ou Maurice G. Dantec. Mais sa production est irrégulière et parfois erratique. Auteur « à éclipses »[7], insuffisamment détaché de ses modèles et luttant contre la dépression[8], il s’éloigne de la fiction pour se consacrer à la critique, à la presse et au cinéma.
Invité par le journal l’Humanité à tenir, pendant toute l’année 2000, une chronique hebdomadaire [9] et par Enki Bilal à participer au scénario d’Immortel Ad Vitam, Lehman disparaît fin 2001 : « [ses] moteurs symboliques se sont arrêtés d’un coup. »[10] L’impossibilité d’écrire Metropolis, uchronie d’une Europe qui n’aurait pas connu la première guerre mondiale, débouche sur une crise profonde qui affecte son rapport au langage[10]. Cette expérience, évoquée dans la conférence La légende du processeur d’histoire[11] et l’essai autobiographique C’est dans la boîte[12] possède une dimension métaphysique qu’on retrouve dans la plupart des textes écrits par Lehman depuis son retour en 2005, y compris ses scénarios de bande dessinée qui l’occupent désormais prioritairement. Cocréateur de la collection Flambant 9 aux éditions de l’Atalante, il publie une dizaine d’albums entre 2007 et 2010. La série en six volumes La Brigade chimérique, coécrite avec Fabrice Colin et dessinée par Gess, semble une tentative de synthèse puisqu’on y retrouve aussi bien la ville de Metropolis que le concept de “processeur d’histoire” et celui du monde comme “récit multimédia”[13]. Parallèlement à son activité de scénariste, Lehman remanie et réédite une partie de ses romans et nouvelles dans trois recueils [14], publie deux anthologies [15] et devient critique au Monde des Livres. À l'été 2012, il codirige avec Benoit Laureau un numéro spécial de La Quinzaine littéraire intitulé Écrire le futur ?
Si Lehman s’est longtemps défini comme un « militant » face à une culture française « terrorisée par le futur et les sciences »[10], il semble avoir pris, depuis son retour à l’écriture en 2005, un virage plus ambigu en suggérant que la SF a, au vingtième siècle, recueilli clandestinement les grands récits métaphysiques et religieux en déshérence. La préface à son anthologie Retour sur l’horizon dans laquelle cette idée est ébauchée a suscité plusieurs réponses [16] et une longue polémique dont le site spécialisé Actusf s’est fait l’écho[17]. L’autre chantier ouvert en 2006 est la réhabilitation du “roman scientifique”, c’est-à-dire la SF française antérieure à 1950, oubliée au profit d’une histoire purement américaine du genre[18]. Lehman emprunte au scénariste et éditeur Jean-Marc Lofficier le terme “d’amnésie volontaire” pour décrire ce phénomène où il voit la trace d’un conflit survenu dans l’imaginaire collectif pendant la deuxième guerre mondiale[19]. La figure du superhéros, présente chez Lehman dès le début[20], semble être la clé de cette double enquête qui se poursuit indifféremment sous forme critique, autobiographique et fictionnelle.